Sviatoslav ZABELIN

 

Un homme modeste qui inspire confiance.


21 octobre. Ce n’est sans doute pas un hasard si Sviatoslav me donne rendez vous dans les coulisses d’un théâtre. Sviatoslav Zabelin est un homme qui ne se met pas en avant, c’est l’un un des rares leaders en Russie qui combine à la fois les compétences du scientifique et du politique, et qui de plus possède des valeurs morales élevées. Ouvert et accessible, il communique facilement avec tous, préférant l’écoute à la parole. Sviatoslav ne prend pas de décisions brutales et n’abuse pas son autorité. Il préfère s’appuyer sur l’expérience collective du mouvement écologique et sur les faits scientifiques.


Après des études de biologie à l’Université d’Etat de Moscou, il s’est impliqué pendant dix huit ans dans le mouvement des “Etudiants, Gardiens de la Nature”, une organisation non gouvernementale unique en URSS. Tout d’abord militant, il est rapidement devenu président du Conseil de Coordination du mouvement. Il est ensuite parti pour le Turkménistan en 1979 où il a travaillé pendant sept ans dans une réserve naturelle. Suite à son retour en Russie, Sviatoslav est devenu une des figures clés de la création en 1989 de l’Union Socio-Ecologique.


De 1991 à 1993, il a travaillé au sein du gouvernement Eltsine comme conseiller d’Etat à la protection de l’environnement et ses conséquences sur la santé humaine. Sviatoslav a joué un rôle majeur dans la prise de conscience des immenses problèmes environnementaux dans l’ex Union Soviétique. Il a également joué un rôle fondamental dans la construction d’un mouvement écologiste issu du terrain, qui a contribué à l’établissement d’un processus démocratique (relatif) en Russie.


Un réseau efficace.


L’industrialisation massive sous la période soviétique a laisse un héritage environnemental désastreux. Ce problème prend encore plus d’envergure aujourd’hui, la fédération de Russie ayant ouvert son espace et ses abondantes ressources naturelles aux appétits des grandes multinationales étrangères.


En 1987, pendant la période de la glasnost, Sviatoslav et ses amis du Mouvement des “Gardiens de la Nature” ont permis la naissance de l’Union Socio-Ecologique, une coalition d’organisations non gouvernementales qui s’est développé très vite et a inclus plus de 200 organisations à travers la C.E.I. et les pays occidentaux dès ses premières années d’existence. En tant que directeur du Centre de Coordination et d’Information de l’U.S.E. de 1987 à 1992, Sviatoslav a créé un réseau via Internet qui a permis la coopération des écologistes de tout l’ex Union Soviétique et a contribué à créer un mouvement cohérent, travaillant dans la même direction. Il est remarquable de noter que l’Union Socio-Ecologique est la seule organisation écologique internationale né sous le règne soviétique.


Au milieu des années 2000, cette organisation regroupait près de 25 000 personnes de 19 pays d’Europe, d’Asie et d’Amérique du Nord. Elle représente aujourd’hui 290 organisations environnementales, situées en Russie et onze autres anciennes républiques de l’ex Union Soviétique, ajoutant l’Ecosse, la République Tchèque, la Finlande, la Palestine, la Norvège, l’Espagne et les Etats Unis.


A moment de sa fondation, le but de cette coalition était de pouvoir rassembler sous un même toit toutes les personnes qui souhaitaient que « cela change, que cela ne soit plus la même chose, que cela ne fonctionne plus comme avant dans ce pays pour son environnement et sa culture, ses habitants, leurs enfants et petits enfants… Des personnes prêtes à travailler pour une nouvelle vision du futur » s’enthousiasme Sviatoslav. L’objectif principal de l’U.S.E. a toujours été d’apporter son soutien aux initiatives locales. Près d’un millier d’activistes (tous n’étant pas membres de l’organisation) offre leur aide au mouvement, par exemple en imprimant et distribuant des dizaines de milliers de newsletters. Ils partagent également leurs connaissances des situations et problèmes locaux dans des groupes de discussions


De plus, l’U.S.E. veut promouvoir l’inter-connexion de ces groupes afin de les aider à travailler en réseau. Ils peuvent ainsi échanger des expériences pratiques et se remonter le moral en cas de crises. Laisser à tous le sentiment de « n’être pas seul, de n’être pas fou, que ce n’est pas sans espoir… » L’organisation met à la dispositin de ses membres toutes ses ressources disponibles, aide juridique, contacts emails, agences et fondations où trouver des fonds…


Parmi les premiers projets de l’U.S.E., il faut mentionner la campagne menée dans toute l’URSS contre des projets de constructions de barrages, de conception ahurissante, souhaitant modifier le cours des fleuves de Sibérie (projets Volga - Chograi et Danube – Dniepr). Cette campagne fut largement soutenue par la population et les médias de l’époque. Cette première victoire de la toute jeune organisation lui a donné un bon départ, mais il serait erroné de croire qu’il ne s’agit que d’une organisation revendicative, organisant des protestations publiques. Elle mène également de très nombreux projets éducatifs, citoyens de protection de l’environnement, reliés au respect des droits de l’Homme. Elle met en place des évaluations d’impact environnemental, des sessions de formations à destination des membres de la société civile mais également de fonctionnaires d’état. 


Les projets actuels de l’U.S.E. sont divers et incluent l’assistance aux populations situés dans des zones contaminées par les radiations, la mise en place d’un réseau de station de surveillance environnementale, l’étude des conséquences de pollutions sur la santé humaine et la protection des espèces menacées. Ses activités sont aussi différentes que ses membres mais elles couvrent dans l’ensemble la promotion de l’implication des citoyens dans les problématiques de sûreté environnementale, l’écologie sociale, la sûreté nucléaire et chimique, les énergies renouvelables, la protection de la biodiversité, la gestion durable des forêts, pollution de l’air et de l’eau, changement climatique. Lobbying et groupes de pression travaillent également en coopération avec l’U.S.E. Les programmes égologiques adoptés dans les domaines de l’habitat, de la santé infantile, de la sûreté nucléaire et de l’éducation à l’environnement ont tous été influencés par l’U.S.E.



















Pays : Russie


Prix Goldman : 2000


Profession : Biologiste


Signe particulier : un leader humble et à l’écoute 

« Bien sûr – la solution est de demander moins. Mais cela demande un profond changement. Il n’y a pas de limite, on peut toujours demander plus. Des demandes illimitées dans un monde limité ? C’est une prescription pour un désastre… »

Un problème :

  1. -Cumul des défis environnementaux à travers l’ex Union Soviétique.


Solutions :

  1. -Fédérer l’ensemble des associations  écologistes.

  2. -Partager les compétences, solutions et expériences positives de chacun pour les relever.

Pour fédérer toutes les énergies vertes

Contact :


Socio Ecological Union

www.seu.ru

environnementale en Russie. Son livre “Time to Search, Time to Loose” (Moscou, 1998) fut un des plus populaire en Russie, traitant des problématiques de développement durable.


Et aujourd’hui ?


En 2001, un vote sur les amendements de la "Loi sur la Nature et la Protection de l’Environnement" a légalisé l’import en Russie des déchets nucléaires étrangers afin de les stocker et les traiter. Une campagne d’information avait été menée pendant des mois et chaque député était bien conscient que près de 90% de la population russe s’opposait fermement à cette loi transformant le pays en « poubelle nucléaire ». Néanmoins, 90% des députés ont voté en faveur de ces amendements.


Ce jour « a vu les masques tomber et les acteurs de la vie politique russe ont montré leur vrai visage. On peut malheureusement conclure que la politique de ce pays se caractérise par une totale indifférence des opinions et des intérêts de sa population, surtout lorsqu’ils s’opposent à ceux des structures de l’Etat » se lamente Sviatoslav.


Le mouvement écologique russe a répondu à ce défi de la seule manière possible, en se consolidant et en démontrant son opposition.


Suivant ce “vote historique” à la Douma, un campagne coordonnée par l’U.S.E. nommée “Résistance Anti-nucléaire a été mise en place dans des douzaines de villes russes, associant les principales associations étrangères de protection de l’environnement (Greenpeace Russie, WWF International, U.S.E., Centre pour la Protection de la Vie Sauvage et le « Dront » centre écologique


Malheureusement les résultats ne sont pas à la hauteur des espoirs placés dans ces démonstrations majeures. La prise en compte par le gouvernement des intérêts de ses citoyens n’est pas une priorité en Russie. Surtout lorsque la majorité des russes ne s’impliquent pas dans le débat public, et encore moins quand on parle d’écologie. Leurs préoccupations et centres d’intérêts d’aujourd’hui sont ailleurs, orientés vers un modèle de consommation effréné. Il reste donc encore un long travail d’éducation et de mise en place de campagnes de sensibilisation du public.


Le budget 2007 de la Russie réserve au ministère de la Défense près de 821 milliards de roubles (+25%) et n’en réserve que 8 milliards (+22%) à celui de l’Environnement. Encore récemment, un conseiller présidentiel a défini la liberté ainsi : « La liberté c’est de pouvoir conduire une voiture et de s’acheter ce que l’on veut ». Les objectifs du mouvement écologiste et du gouvernement semblent n’avoir jamais été aussi éloigné les uns des autres qu’aujourd’hui…


Aujourd’hui le problème le plus fondamental auquel se confronte Sviatoslav est le manque chronique de moyens, ne lui permettant plus de développer ses projets. Il ne faut pas attendre de subventions de l’Etat et les bourses et aides provenant de l’Etranger sont de plus en plus rares.


Les bureaux de l’U.S.E. ont du se déplacer en banlieue de Moscou, dans les étages d’un théâtre, où l’on accède en passant derrière les coulisses. Y sont stockés de nombreux ouvrages, dépliants et cartes, représentant près de 15 ans d’activisme.


A la fin de notre rencontre, Sviatoslav me raccompagne jusqu’au métro. Afin de bien me faire comprendre le manque de moyens auquel il est confronté, il ne peut alors s’empêcher de conclure par un proverbe russe qui était utilisé lors des famines de la période soviétique : « On peut toujours remiser nos dentiers sur l’étagère… »


Texte ©  S. Viaud

Intervenir sur les politiques environnementales.


De 1991 à 1993, Sviatoslav Zabelin a également travaillé en tant qu’assistant d’Alexeï Iablokov, le conseiller du président russe Boris Eltsine, sur les questions d’écologie et de santé. Il a alors contribué à la rédaction de propositions de lois liées à la protection de l’Environnement. Son travail a permis d’établir les droits des ONGs à préserver les ressources naturelles du pays et de poursuivre en justice ceux qui choisiraient de violer ces lois de protection de l’Environnement.


Mais, en 1993, il a décidé de quitter le gouvernement afin de travailler de nouveau à plein temps pour l’U.S.E. Selon ses propres mots, ce choix fut pris dans le but de fournir un travail plus efficace... En 1995, il a proposé un document sur le développement durable en Russie, qui représentait une alternative aux orientations politiques officielles, la “Doctrine Ecologique Russe”.


Cette “Doctrine Ecologique Russe” rassemble les grands principes, les priorités, les objectifs et les moyens pour mettre en place un réel développement durable de la Fédération de Russie et de la protection de son environnement à moyen terme (jusqu’à 2010). Ce document souhaite établir les bases d’une politique